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Rentrée scolaire en Algérie : les constats amers des enseignants

Rentrée scolaire en Algérie : les constats amers des enseignants

La rentrée scolaire 2020/2021 pour les élèves du primaire a eu lieu mercredi 21 octobre en Algérie. Elle intervient dans un contexte marqué par la crise sanitaire liée à l’épidémie de Covid-19.

Un protocole sanitaire a été élaboré par le ministère de l’Éducation et le comité scientifique de surveillance de l’épidémie de Covid. Beaucoup d’enseignants critiquent d’ores et déjà le manque de moyens dans les écoles.

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« Dans la conjoncture actuelle, on s’attendait à des caravanes des cadres du secteur de la santé pour sensibiliser les élèves et le personnel éducatif. On s’attendait à l’application stricte des mesures sanitaires et gestes barrières …. Hélas rien de cela, on s’est retrouvé seuls et sans moyens face à cet ennemi invisible », témoigne Bachir Kiouas enseignant à l’école Amir Soltane à Chéraga (Alger ouest).

À Adrar , les conditions du déroulement de la rentrée ne sont guère différentes de celles vécues par les enseignants à Alger. « C’est une misère. Il n’y a pas de moyens pour appliquer le protocole sanitaire, malgré qu’il y ait eu distribution de thermomètres électroniques et des bavettes. Mais en général, ici à Adrar, et en particulier dans l’école où j’exerce, il y a un manque de moyens », témoigne Abdelkrim Soufi, enseignant de français à l’école Mohamed Boudiaf dans la localité d’El Allouchia.

Des écoles sans chaises ni tables à Adrar

Des moyens indispensables à l’enseignant pour qu’il puisse exercer dans des conditions idoines font aussi défauts. « Par exemple, les bavettes (offertes par la collectivité locale) ne suffisent pas au-delà d’une semaine », relève-t-il.

Selon cet enseignant, d’autres écoles n’ont pas connu le même traitement. « Il y a des établissements qui n’ont même pas de chaises et de tables », précise-t-il.

À ces carences s’ajoute l’absence d’eau de robinet. Dans l’établissement où il exerce, M. Soufi reconnaît que c’est le directeur qui se démène comme il peut pour se procurer l’eau potable. Notre interlocuteur met en exergue le « flou » qui concerne la mise en œuvre du programme de la nouvelle organisation pédagogique induite par la conjoncture sanitaire, avec un décalage entre ce qui est annoncé par la tutelle et ce qui est pratiqué au niveau local. L’instituteur s’inquiète d’une augmentation des volumes horaires.

Des parents d’élèves ont refusé de scolariser leurs enfants

Ces défaillances ont été également constatées par le Conseil national autonome des professeurs de l’enseignement secondaire et technique élargi (Cnapest-E) qui compte aussi des enseignants du primaire.

« Nous avons constaté hier que la plupart des écoles primaires sont dépourvues des moyens les plus élémentaires », affirme Messaoud Boudiba, coordinateur national du Cnapest-E chargé de la communication.

Le syndicaliste confirme que des parents d’élèves ont refusé de scolariser leurs enfants en raison de l’absence de moyens de protection comme le stipule le protocole sanitaire de l’éducation nationale.

« Nous avons tiré la sonnette d’alarme et avons déclaré que réunir des conditions sécurisantes en vue de la rentrée scolaire va encourager les parents d’élèves et va les rassurer pour la reprise de leurs enfants. En n’assurant pas ces moyens on ne fait que compliquer les choses et cette façon de faire pourrait déboucher sur des situations incontrôlables », indique Boudiba.

« La situation est telle que des enseignants se sont vu dire par les directeurs de l’éducation débrouillez-vous pour trouver les produits d’hygiène et actionnez vos connaissances (sic). C’est grave ! », s’étrangle le syndicaliste.

Deux bouteilles d’eau de Javel pour chaque établissement à Béjaia

Le SG du Syndicat autonome des travailleurs de l’éducation et de la formation (Satef), Boualem Amoura, apporte un autre témoignage édifiant sur le degré d’impréparation des établissements scolaires pour faire face à l’épidémie de la Covid-19.

« Dans une commune comme Bejaia, l’une des plus riches d’Algérie, les directeurs d’écoles se sont vu donner deux bouteilles d’eau de Javel comme produits d’entretien et d’hygiène afin d’appliquer le protocole sanitaire », rapporte-t-il.

Le syndicaliste évoque aussi le cas d’établissements dans des communes de la wilaya d’Adrar tout aussi dépourvus des produits d’hygiène.

« On en reparlera encore le 4 novembre (lors de la rentrée des élèves des deux cycles moyen et secondaire, ndlr), on ne tire pas de leçons. Depuis janvier 2017, le ministère de l’Éducation a réduit le budget de fonctionnement des collèges et des lycées de 65 %. Un établissement scolaire fonctionne avec un budget annuel de 900 000 DA et il est amputé de plus de la moitié de sa dotation annuelle. Que peut faire un directeur d’établissement avec une somme pareille, au moment où un député touche 400 000 DA mensuels ? », s’interroge Boualem Amoura, ajoutant que des chefs d’établissement « n’arrivent même pas à payer les frais d’électricité et d’eau ».

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