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Hôpitaux publics : qu’est-ce que le service civil dénoncé par les médecins résidents ?

Hôpitaux publics : qu’est-ce que le service civil dénoncé par les médecins résidents ?

Les médecins résidents poursuivent un mouvement de protestation depuis plus de trois semaines. Parmi leurs revendications, l’amélioration de leurs conditions de travail, un traitement égal des médecins et des autres citoyens lors des exemptions du service national, bénéficier des œuvres sociales auxquelles ils contribuent avec leurs cotisations. Et surtout : l’assouplissement et l’aménagement du service civil. De quoi s’agit-il ?

Officiellement, le service civil a pour objectif de lutter contre les déserts médicaux et de couvrir les besoins des régions du sud et des Hauts-Plateaux en médecins spécialistes. Mais les médecins résidents – ceux qui effectuent une spécialisation-, premiers concernés, y voient une mesure démagogique et dénoncent son échec. Mokhtar Hasbellaoui, ministre de la Santé, aurait lui aussi reconnu cet échec, lors d’une rencontre qui s’est déroulée hier, mercredi 29 novembre, avec les représentants des résidents.

Avec cette obligation instaurée par une loi de 1984, les médecins spécialistes ayant fini leur formation ne peuvent exercer leur profession avant d’avoir effectué le service civil, dont les modalités ont été à plusieurs reprises durcies ces dernières années. Ainsi, les médecins spécialistes pouvaient se libérer du service en réussissant au concours de maîtrise. Chose qui ne sera plus possible si l’article 206 de la nouvelle loi de santé est adopté tel que proposé par le ministre de la Santé.

L’affectation des médecins spécialistes dans le cadre du service civil se fait sur tout le territoire national, selon les besoins des structures de santé de chaque région. Une liste de postes à pourvoir est établie par le ministère. Les jeunes médecins spécialistes, convoqués à la « répartition », choisissent leurs postes à tour de rôle suivant leur classement à l’examen du DEMS. Mais même les médecins bien classés et qui ont le choix entre un grand nombre de postes, se retrouvent face à un dilemme : choisir le confort et la proximité des hôpitaux du nord du pays, quitte à faire un service civil d’une durée de trois ou quatre ans ou alors, endurer l’éloignement, le manque de moyens et affronter un environnement qui leur est étranger dans les hôpitaux des zones reculées, afin de se défaire plus rapidement de cette obligation, le service civil dans ces régions ne durant qu’une ou deux années, selon les zones.

« Une fois affecté, le médecin spécialiste est « condamné » et il n’aura plus d’autres choix que de rejoindre son poste ou de rester au chômage », selon un jeune médecin spécialiste en cardiologie. Une procédure de recours et de contestation des affectations est bien prévue par la réglementation mais cette procédure n’aboutit presque jamais, selon notre interlocuteur.

Même si les conditions de travail dans les établissements de santé du nord du pays sont décrites par les médecins comme étant effroyables, la situation est bien pire dans les zones reculées du pays, notamment dans les Hauts-Plateaux et au Sud, selon eux. Là, les médecins se plaignent d’être confrontés à un environnement qui leur est étranger et de conditions de travail caractérisées par un manque flagrant de moyens.

La prise en charge des médecins affectés dans les hôpitaux du Sud est dénoncée par tous les médecins approchés par TSA. Ainsi, une spécialiste en endocrinologie et diabétologie affectée dans un EPH du sud du pays affirme n’avoir pu rejoindre son poste pendant plus de six mois faute de logement. Une autre spécialiste en oncologie est « toujours au chômage », plus d’une année après sa réussite à l’examen de DEMS car, affectée à un hôpital situé à plus de 400 kilomètres de chez elle, aucun logement n’a été mis à sa disposition et aucune compensation financière ne lui a été accordée, alors que les dispositions du service civil prévoient de tels avantages et compensations.

La situation pour les couples de médecins spécialistes mariés est encore plus délicate. Aucune disposition de regroupement familial n’étant prévue par le règlement du service civil, les spécialistes mariés se voient souvent affectés chacun dans des hôpitaux situés à des centaines, voire des milliers de kilomètres de distance.

Cette situation sociale précaire des médecins spécialistes pendant leur service civil est aggravée par leurs conditions de travail. « Les hôpitaux étant de moins en moins bien pourvus en matériels et en moyens techniques à mesure que l’on s’éloigne du Nord et des grandes agglomérations, les médecins spécialistes envoyés dans des établissements de santé situés dans des zones reculées se retrouvent souvent les bras croisés », explique un spécialiste en hépato-gastrologie affecté dans un hôpital du grand Sud. « Nous n’avons aucun appareil d’imagerie, nous ne pouvons réaliser aucun bilan biologique, au final, nous sommes condamnés à rester sur place mais sans rien pouvoir apporter à la santé de la population de la région », a-t-il regretté.

Le service civil des médecins spécialistes n’est pas une spécificité algérienne, de tels dispositifs existent dans d’autres pays, comme la Tunisie. Mais chez nos voisins de l’Est, le service civil ne dure qu’une année et, pour les hommes, il peut se substituer au service national militaire. Contrairement à ce qui se passe en Algérie, où, après avoir terminé leurs longues études et après avoir accompli une à quatre années de service civil, les médecins spécialistes hommes se voient obligés d’affronter l’obligation d’effectuer une année de service national.

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