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Quelles sont les prérogatives du Premier ministre ?

Quelles sont les prérogatives du Premier ministre ?

Abdelmadjid Tebboune a pris, ce jeudi, ses nouvelles fonctions de premier ministre. Il a été nommé officiellement à ce poste mercredi en remplacement d’Abdelmalek Sellal. Mais quelles sont les prérogatives du premier ministre ? « Le Premier ministre est un primus inter pares (expression latine). C’est-à-dire qu’il est seulement le premier d’entre les ministres, que ce n’est pas leur chef. C’est un simple coordinateur de l’activité ministérielle », avance d’emblée, Fatiha Benabou, constitutionnaliste, professeure à l’université d’Alger et auteure de plusieurs livres dont Le droit parlementaire algérien.

Avec la Constitution de 1989, les réformateurs voulaient introduire subrepticement et progressivement un système semi présidentiel ou un bicéphalisme de l’exécutif avec deux têtes : un chef d’Etat et un chef du gouvernement, rappelle notre interlocutrice qui évoque toutefois une certaine ambiguïté dans le texte qui avait posé un certain nombre de problèmes à l’époque. « Cette situation était intenable pour le président Bouteflika qui avait une trop forte personnalité pour accepter un démembrement de la citadelle de l’exécutif », explique Fatiha Benabou qui rappelle les différends qu’a eus le chef de l’État avec ses chefs de gouvernement au début des années 2000.

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« Le premier était Ahmed Benbitour qui a jeté le tablier en lui disant : vous ne m’avez pas laissé choisir une équipe ministérielle et vous avez utilisé une institution parallèle à la Présidence pour élaborer une batterie d’ordonnances », rappelle-t-elle. « Questionné lors d’une interview accordée à une chaîne de télévision française sur le programme de son chef du gouvernement, le Président avait déclaré que Ahmed Benbitour n’avait pas de programme gouvernemental car c’est moi qui aie été élu sur la base d’un programme », rappelle la constitutionnaliste. En 2008, Abdelaziz Bouteflika a décidé de réviser la Constitution. « Il a éclairci tous les débats (sur ces questions) », estime la constitutionnaliste.

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Dans la Constitution actuelle, le Premier ministre n’est pas « individualisé », selon elle. Aucun chapitre n’est, effectivement, consacré à sa fonction dans la loi fondamentale. « Le Premier ministre peut choisir son équipe mais le dernier mot revient au Président qui préside le Conseil des ministres d’ailleurs. Il a le pouvoir de l’application des lois, c’est tout. Même son plan d’action, il le trace à partir du programme du président de la République », explique Fatiha Benabou qui souligne cependant que le Premier ministre est en même temps « responsable de son action devant l’Assemblée populaire nationale (APN) ».

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C’est pour cette raison que la constitutionnaliste le qualifie de « bouc émissaire ». « Je l’appelle le bouc émissaire parce qu’il risque de sauter de son poste, qui est éjectable, pour préserver le président de la République quand il y a une crise par exemple », analyse Fatiha Benabou. « Il va donc protéger la fonction présidentielle de l’usure du pouvoir », poursuit-elle. Pour cette professeure de droit, il y a une certaine « aporie » créée sur le plan de la théorie constitutionnelle. « En théorie constitutionnelle, là où il y a le pouvoir, il y a la responsabilité. Chez nous, il y a une responsabilité politique sans pouvoir. C’est une aporie. Il y a aussi un pouvoir très important (celui du Président) sans responsabilité politique correspondante », conclut-elle.

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