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« Macron a proposé aux Algériens un partenariat d’égal à égal, gagnant-gagnant »

« Macron a proposé aux Algériens un partenariat d’égal à égal, gagnant-gagnant »

François-Aissa Touazi est cofondateur du think tank CapMena, basé à Paris. Il est également expert du monde arabe. Il a accompagné Emmanuel Macron lors de son dernier voyage à Alger. Entretien

Quel Bilan faites-vous de la visite de Macron ?

Cette visite d’amitié et de travail a surtout été l’occasion pour Emmanuel Macron de réaffirmer son attachement à la construction d’un avenir commun entre la France et l’Algérie, d’exprimer sa vision d’une relation plus approfondie et ambitieuse misant sur la jeunesse, l’économie et l‘innovation, et permettant aux deux pays de se projeter vers l’avenir. Il est à noter que cette visite s’est inscrite dans le cadre d’une séquence algérienne particulièrement riche, ouverte par la 4e session du COMEFA, tenue à Alger le 12 novembre et clôturée par le séminaire Inter-Gouvernemental qui s’est tenu à Paris le 7 Décembre. Ces deux rencontres ont été l’occasion de résultats concrets et d’avancées significatives dans le partenariat franco-algérien.

Lors de ce déplacement, Emmanuel Macron a surtout proposé aux Algériens un partenariat d’égal à égal, gagnant-gagnant à un moment où l’Algérie a besoin de partenaires fiables pour réussir la transition vers son nouveau modèle de développement économique, et où la France a inscrit l’Afrique et le Maghreb au cœur de ses priorités diplomatiques. Le succès de cette ambition africaine du président Macron va en partie dépendre du soutien des grands pays de la région. En effet, l’Algérie, puissance régionale, grâce à sa centralité au Maghreb et son influence en Afrique, aura un rôle déterminant dans la réussite de ces initiatives. Le président Macron a su tenir un discours franc et sincère sur des sujets aussi sensibles que la réconciliation mémorielle ou les questions de circulation, en ouvrant notamment de nouvelles perspectives en particulier sur le terrain économique ou sur le rôle de la diaspora.

Les autorités algériennes ont semblé apprécier aussi bien la méthode que le contenu de ce partenariat renouvelé.  

A-t-il obtenu des réponses à ses demandes sur l’économie, le terrorisme et les visas ?

Les Algériens ont été attentifs là aussi aux initiatives présentées par le président Macron sur ces différents sujets. Il a insisté sur son attachement à la dimension humaine de notre partenariat et sur le rôle déterminant de nos sociétés civiles pour nourrir cette relation. Il s’est engagé à une plus grande ouverture dans l’octroi des visas pour les artistes, étudiants, chefs d’entreprises, stagiaires tout en considérant que les visas ne « pouvaient pas constituer un projet de vie », réaffirmant la disponibilité de la France à accompagner l’Algérie tant dans la formation de cette jeunesse que dans le cadre de partenariats structurants, créateurs d’emplois.

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Il a aussi exprimé le souhait d’une plus grande ouverture de l’économie algérienne, de sa nécessaire modernisation afin d’encourager son attractivité et doper l’entrepreneuriat. Enfin, sur la lutte contre le terrorisme au Sahel et en Libye, les deux pays partagent les mêmes préoccupations.

Le président Macron a manifesté le désir que l’Algérie et la France renforcent leur coopération dans tous les domaines afin de lutter efficacement contre les risques de chaos qui menacent la région. 

Ouyahia semble satisfait de la visite sur la reconnaissance de la mémoire historique, il n’a pas parlé de repentance, c’est positif ?

Emmanuel Macron est resté dans la droite ligne des propos qu’il avait prononcés lors de sa visite à Alger en tant que candidat. Il a réaffirmé lors de son déplacement qu’il assumait ses propos. Il est en effet convaincu que la France doit avoir le courage de reconnaître ce passé qui ne passe pas, les pages sombres de son histoire qui ont tant miné notre relation. Mais il a invité les nouvelles générations à ne pas être prisonnières de ce passé afin qu’elles se projettent dans l’avenir.

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Enfin, outre la restitution des crânes de résistants algériens conservés au musée des sciences de l’ homme à Paris, il s’est engagé à soutenir le travail des historiens par la création d’un centre de recherche qui aura pour vocation de travailler sur les questions mémorielles.

Il semble qu’il y ait aussi une prise de conscience de part et d’autre, d’une indispensable réconciliation des mémoires pour permettre un passage apaisé de la mémoire à l’histoire.

Que signifie cette annonce de l’école 42 ? Quel message aux jeunes algériens ?

Cette annonce exprime la volonté du président Macron de soutenir l’Algérie dans la formation de ces nouveaux métiers et aussi dans le développement d’une économie dynamique et moderne à travers le développement des nouvelles technologies et du numérique. C’est par le biais du développement d’écosystèmes, créateurs d’emplois dans les nouveaux métiers de l’internet, du codage informatique et des nouvelles technologies que l’Algérie pourra aussi répondre au fort taux de chômage chez les jeunes.

C’est aussi dans cet esprit que le président français a annoncé la création d’un fonds d’investissement franco-algérien, qui devra non seulement mobiliser des capitaux pour soutenir les projets innovants mais aussi offrir de l’accompagnement.

La création d’une école numérique en Algérie, à l’image de l’école 42, constituera une étape concrète de cette nouvelle dimension de notre partenariat.

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Trump a reconnu Jérusalem comme capitale d’Israël. La réaction des pays arabes n’est pas forte, pourquoi ?

La décision unilatérale du Président Trump de reconnaître Jérusalem comme capitale d’Israël n’a pas été suivie de réaction particulièrement forte dans le monde arabe. Embourbés dans des transitions difficiles suite aux Printemps arabes ou paralysés par leur alliance avec Washington, considérée comme primordiale pour faire face à leur grand rival iranien, le monde arabe a été incapable de se faire entendre, payant au prix fort ses nombreuses divisions et ses fragilités comme s’il semblait ne plus être maître de son destin.

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À l’inverse, d’autres pays musulmans non arabes, les Turcs et les Iraniens ont profité de cette occasion pour promouvoir leur leadership auprès du monde musulman et s’imposer comme leaders incontestés de la cause Palestinienne. En définitif, cette décision de Donald Trump va profiter essentiellement aux radicaux et aux mouvements islamistes, mais aussi à la Turquie et à l’Iran qui ont marqué des points auprès des opinions arabes et musulmanes. Elle pourrait fragiliser l’Arabie saoudite et d’autres pays du Golfe, surtout inquiets de l’expansionniste iranien et qui semblent tentés par un rapprochement avec Israël négocié par le gendre de Donald Trump, Jared Kushner, en échange d’une relance du processus de paix.

Les tensions entre l’Iran et l’Arabie saoudite sont lourdes de menaces pour la stabilité de toute la région. L’Algérie, qui entretient de bonnes relatons avec ces deux pays, pourrait mobiliser sa diplomatie et mener une médiation constructive qui s’avère indispensable pour éviter l’escalade.

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